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Premiers secours en santé mentale : un record pour l’université de Bordeaux

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Les étudiants et personnels formés par l’université de Bordeaux aux premiers secours en santé mentale (PSSM) étaient rassemblés mardi 3 juin à Talence lors d’une journée organisée par l’Espace santé étudiants et l’association PSSM France. L’occasion de revenir sur l’engagement au long cours de l’université française qui forme le plus d’étudiantes et étudiants à cet enjeu majeur de santé publique.

Photo : Florence Touchard, coordinatrice du projet Premiers secours en santé mentale à l'université de Bordeaux, remercie les formatrices et les secouristes © Gautier Dufau
Florence Touchard, coordinatrice du projet Premiers secours en santé mentale à l'université de Bordeaux, remercie les formatrices et les secouristes © Gautier Dufau

Dans la vie, il faut essayer de prendre le bon chemin, marcher, se relever. Alyénor n’a que 19 ans, mais ça y est, elle a trouvé sa voie. Elle a toutes les raisons d’afficher un sourire solaire et le regard fier. L’étudiante en L3 psychologie à l’université de Bordeaux n’a plus aucun mal avec ça : parler. Des joies, des rires, des réussites. Des liens compliqués avec la famille, de l’anxiété, des déceptions, de son cancer lorsqu’elle avait 15 ans. Alors, « j’ai compris quelque chose d’assez simple : pour être fort dans les moments difficiles, mettre des mots sur ce qu’on vit, ça aide. Parler, c’est s’entourer. » Elle le sait, « la formation aux premiers secours en santé mentale [lui] a donné des clés très pratiques, applicables au quotidien ». Dans la vie d’Alyénor, les crises de panique surviennent encore sans prévenir. Désormais, « je comprends mieux mes réactions. Surtout, je sais expliquer aux autres pourquoi je suis comme ça, ce dont j’ai besoin dans ces moments-là. »

Mardi 3 juin, à l’occasion de la journée en l’honneur des secouristes formés aux premiers secours en santé mentale, organisée par l’espace santé étudiants et PSSM France, elle n’a pas hésité à faire entendre sa voix, en se levant au milieu du public de l’Agora du Haut-Carré, à Talence. Elle n’aurait sans doute jamais réussi à le faire avant. En des mots simples, elle a salué l’existence de cette formation qu’elle a pu suivre gratuitement. Face à l’assemblée, la jeune femme a encouragé à s’y inscrire ceux qui n’y seraient pas encore passés afin qu’ils rejoignent la communauté des plus de 3000 étudiants et 500 personnels formés à l’université de Bordeaux.

Des « efforts sur le temps long »

L’établissement n’a pas attendu que la santé mentale soit érigée en grande cause nationale 2025 par le gouvernement pour en faire une priorité. Dès 2019, il a fait partie des quatre universités françaises à participer aux formations pilotes menées par PSSM. Désormais, Bordeaux est devenue l’université française qui forme le plus d’étudiants. « Il existe une dynamique propre au campus bordelais, souligne Caroline Jeanpierre, directrice de l’association. Il y a quelque chose de précurseur à Bordeaux. On voit que l’université réussit à inscrire ses efforts sur le temps long. »

Et ce, malgré « un contexte budgétaire contraint », souligne Bernard Muller, vice-président en charge de la vie étudiante et de la vie de campus. Chaque année, l’université de Bordeaux, soutenue par l’Agence régionale de santé, la Région, et la Contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), investit 200.000 euros en faveur du dispositif. Si « la santé a un coût, elle n’a pas de prix. Nous continuerons à développer ces formations, ainsi que la recherche dans ce domaine. Il s’agit d’un enjeu de santé publique », insiste Bernard Muller. 

Des mains tendues

Au cours de sa vie, un Français sur quatre est atteint de problèmes liés à la santé mentale. Les 18-24 ans sont les premiers concernés : le Lab santé étudiants de l’université de Bordeaux a estimé la proportion d’étudiants touchés par des symptômes dépressifs à près de 41% en 2024. « Il y a un vrai besoin, confirme Florence Touchard, infirmière à l’espace santé étudiants. Les étudiants se sentent concernés parce que la majorité des troubles psychologiques émergent entre 15 et 25 ans. On aurait pu croire que ces difficultés allaient disparaître avec la fin de la pandémie. Le Covid est passé, le mal-être des étudiants persiste. »

Corentin, 21 ans, en troisième année de maths-informatiques, casquette de baroudeur vissée sur la tête, ne se voyait pas rater la journée du 3 juin. Dans les couloirs du Haut-Carré, cet amoureux de la nature a quitté le jardin familial en pleine campagne girondine pour assister au rendez-vous sur le campus. Il se souvient des tours, des tours, et des tours dans le jardin pendant le confinement. Privé de sortie alors qu’il était en terminale, il se sentait désarmé face à la solitude de ses amis, le stress, l’isolement. « Depuis que j’ai été formé, j’ai une autre façon d’approcher ceux qui en ont besoin », dit-il. Comme lui, Laetitia Morel-Pouliquen, professeure à l’IAE de Bordeaux, n’a pas toujours su comment réagir face aux situations complexes de ses étudiants. Depuis qu’elle est secouriste en santé mentale, elle a collé un sticker « PSSM » au dos de l’ordinateur posé sur son bureau de salle de classe. Ses élèves savent qu’ils peuvent se tourner vers elle. Des mains tendues qui changent tout.
 

Une convention unique en France

Engagé en faveur de la formation aux Premiers secours en santé mentale, l’Espace santé étudiants de l’université de Bordeaux a franchi une nouvelle étape en faveur du bien-être des étudiants et des personnels en signant une convention de partenariat avec PSSM France, le 3 juin 2025. « Ce partenariat permet de faire du lien, de donner de la visibilité et de faire rentrer progressivement dans les consciences l’attention que nous voulons porter à la santé mentale, explique Anne Moreau, directrice de l’Espace santé étudiants. C’est une manière d’acter notre confiance mutuelle. »

Avec près de 4 000 secouristes formés aux Premiers secours en santé mentale depuis 2019, l'Espace santé étudiants (ESE) de l’université de Bordeaux est devenu le premier établissement à former des secouristes en France. Depuis le lancement de cette formation, il joue un rôle crucial en faveur du bien-être des étudiants et du personnel, en leur fournissant les outils nécessaires pour reconnaître et répondre aux besoins en santé mentale.