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Mise à jour le : 16/06/2023
Faut-il assumer un parti pris ou chercher la neutralité ? Embrasser le numérique ou se dédigitaliser ? Donner ou non un visage aux enjeux ? La façon dont les sciences infusent dans la société suscite des interrogations que les Rencard du Savoir investiguaient en mai dernier.
Entre crises environnementale, énergétique, sociale et sanitaire, difficile d’imaginer parler des sciences aujourd’hui comme on le faisait il y a dix ou vingt ans. Armés de nouveaux outils, explorant de nouveaux formats, journalistes et médiateurs cherchent à faire évoluer leurs pratiques. Le 9 mai dernier, au Musée d’Aquitaine, les Rencards du Savoir proposaient d’aborder le sujet en entrecroisant les regards d’Anne-Sophie Novel, autrice et journaliste indépendante spécialisée dans les médias et l’écologie, Jessica de Bideran, maîtresse de conférences en science de l’information et de la communication à l’Université Bordeaux Montaigne, Yann Le Moigne, formateur et concepteur d’outils pédagogiques aux Petits Débrouillards ainsi que Boris Urbas, responsable du master Information et médiation scientifique et technique (cohabilité par l’université de Bordeaux et l’université Bordeaux-Montaigne). Retour sur quelques questions abordées.
Les Français seraient incultes en sciences et, par là même, bien trop perméables aux théories complotistes et aux fake news. C’est en tout cas le message ressassé sans cesse depuis la crise sanitaire par des éditos et tribunes en tout genre. Et, en effet, « si l’on considère - comme le font de nombreux sondages - les savoirs fondamentaux appris à l’école et les capacités à les mobiliser (sur les antibiotiques, le système solaire…), on s’aperçoit que les réponses peuvent être assez décevantes », reconnaît Boris Urbas. D’où le constat, récurrent, d’un niveau de culture scientifique trop faible. « Mais il y a d’autres manières de regarder comment les sciences infusent dans la société », tempère le chercheur. En un demi-siècle, il note notamment combien l’offre de diffusion de la culture scientifique a considérablement augmentée. Difficile, donc, de considérer que nous soyons sous-informés. Par ailleurs, des sociologues et anthropologues tels Bruno Latour ont montré combien nous vivons dans une société extrêmement technologique et scientifique : immergés dans ce bain dès notre plus jeune âge, nous en avons tous une certaine expertise, autre que scolaire. Reste à la mobiliser.
Comme le souligne Yann le Moigne, prendre en compte cette « expertise du quotidien » amène certains professionnels de la culture scientifique à travailler différemment. « Aux Petits Débrouillards, notre principal objectif n’est pas d’amener les gens aux savoirs mais de les pousser à interroger leurs références, leurs représentations du monde. C’est adopter une posture de facilitateur et non de sachant : au lieu de se placer entre les savoirs et le public, les médiatrices et médiateurs sont avec le public face aux faits », explique-t-il.
Dans une logique similaire, Anne-Sophie Novel prône l’idée de « médias médiateurs ». Face à l’importante défiance envers la profession journalistique, elle estime qu'il faut « se rendre très disponible en local, sur le terrain, pour tisser des liens de confiance et co-construire l’information avec les publics. » Le média néerlandais De Correspondant a même tenté l’expérience d’ouvrir à ses adhérents son processus éditorial (calendrier, sujets abordés…). Quant aux récits contés par les journalistes, Anne-Sophie Novel insiste sur l’importance de dépasser les seuls faits pour donner aux lecteurs des moyens d’agir.
« A partir du moment où l’on choisit un sujet, où l’on fait une hiérarchie dans l’information, il y a déjà un positionnement qui est pris », répond de but en blanc Anne-Sophie Novel. Je préfère donc que cela soit assumé et clairement indiqué ». Il s’agit, là encore, d’ouvrir la fabrique informationnelle, en permettant au public, sinon d’y participer, au moins de lui permettre de voir clair dans ses rouages. Sur Médiapart ou The Conversation, par exemple, les auteurs remplissent une déclaration d’intérêts facilement consultable.
Reconnaître un positionnement ne signifie pas pour autant faire fi de la nuance. Boris Urbas évoque ainsi le sociologue Yves Gingras qui décrit les sciences comme un monde traversé en permanence par des controverses. Journalistes comme médiateurs scientifiques doivent composer avec cette complexité et la faire transparaître dans leur discours. Attention, toutefois, à bien prendre la mesure de l’état des connaissances sur un sujet : trop longtemps des climatosceptiques ont été invité dans les débats en dépit du consensus scientifique…
« Je pense que l’on assiste déjà à un changement d’opinion sur la question », répond Jessica de Bideran. Des expériences augmentées aux visites virtuelles, « dans les musées, cela fait plus de vingt ans que l’on expérimente à tout crin. Mais aujourd’hui, on en revient presque et l’on commence à se dire qu’il serait bien d’être déconnecté lorsque cela n’est pas nécessaire. » Le dispositif numérique adéquat, c’est ainsi « celui dont les médiateurs peuvent se saisir pour interagir avec le public et qui, de surcroît est relativement sobre ». Jessica de Bideran renvoie ici à l’impact environnemental des outils déployés (écrans, tablettes, data centers…), notamment leur empreinte carbone qui est loin d’être négligeable.
Dans la presse aussi, on questionne les pratiques, qu’il s’agisse des formats – quelle place pour la vidéo courte ? – comme de leurs impacts environnementaux. La Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique invite ainsi à être bas carbone tant dans le matériel que la méthode, en privilégiant notamment des correspondants locaux plutôt que des voyages énergivores.
Sur des plateformes comme Youtube, Twitch ou Instagram, les sciences sont contées par de « vraies personnalités, qui ont des followers (suiveurs) – le terme n’est pas anodin – constituant autour d’eux des communautés », rappelle Boris Urbas. Or, quand les instituts de recherche tentent d’investir ces canaux, il leur manque souvent les codes et… l’incarnation. Certains font donc plutôt le choix de nouer des collaborations. Plus efficace, mais pas dénué de limites : « À mon sens, la médiation culturelle est un outil pour construire du commun et faire société. Or, dans quelle mesure peut-on considérer que la communauté du youtubeur ou de l’influenceur va s’élargir sur un temps plus ou moins long ? », s’interroge notamment Jessica de Bideran.
Du côté de la presse, Anne-Sophie Novel met en garde des effets pervers d’une hyper-personnification. Ce sont souvent les mêmes scientifiques qui sont invités : s’ils donnent un visage à une cause, aidant à la porter, ce sont d’importants enjeux qui vont reposer sur l’adhésion ou non à ces « figures » médiatiques. Un dilemme également vrai pour des journalistes médiatiques et engagés. Pour entendre une multiplicité de voix et dépersonnifier les sujets, il faut donc que les citoyens maîtrisent les codes et sachent diversifier les sources : l’enjeu d’éducation aux médias se fait de plus en plus prégnant.
Par Yoann Frontout, journaliste scientifique et animateur des Rencards du savoir